Rollerball (1975) de Norman Jewison
Modérateurs : Karen, savoy1, DeVilDead Team
Rollerball (1975) de Norman Jewison
Dans un futur proche, les nations ont disparu, laissant le pouvoir à des compagnies multinationales gérant les besoins humains tels que l'eau, l'énergie, etc... En contrepartie du confort matériel qu'elles garantissent, ces firmes exigent des individus qu'ils obéissent à toutes leurs décisions... Pour canaliser la violence des personnes, un sport très populaire, le Rollerball, a été créé, lequel implique de nombreux chocs physiques et une grande rapidité, un peu à la manière du Hockey sur glace ou du football américain. Jonathan, un des meilleurs joueurs de l'équipe de Houston devient une vedette très populaire. Mais les dirigeants de son équipe, lesquels sont aussi les chefs de la multinationale de l'énergie, lui demandent de prendre sa retraite rapidement...
Cela va bientôt faire 30 ans que le film de Norman Jewison est sorti sur les écrans. S'inscrivant en droite ligne dans le courant de la SF pessimiste des années 70, il s'inspire notamment d'"Orange mécanique" pour son esthétique léchée, pour la mise en avant de compositions classiques et, surtout, par son approche visuelle, dénonciatrice, mais aussi ambigüe, de la représentation de la violence. Jewison dit vouloir dénoncer son exploitation en tant que spectacle (les joueurs du Rollerball sont clairement les gladiateurs du futur), mais les séquences les plus fameuses restent celles des matchs de Rollerball.
A cela une bonne raison : en adoptant, pour les tourner, une forme documentaire, Jewison leur apporte une vivacité et une authenticité telles qu'on a réellement l'impression d'assister à un match d'un sport réel, authentique. Les trouvailles y sont multiples (l'emploi des motos, le lancement de la balle, etc...) et son approche fétichiste de certains éléments graphiques (cuir, clou) relève d'une esthétique annonciatrice du mouvement punk ou des Mad Max. A ce titre, l'arrivée des joueurs sur le terrain au début du film est un moment d'anthologie.
Les scènes de Rollerball, ce sont aussi des cascades nombreuses et extrêmement réussies, ainsi qu'un travail sur le montage et les prises de vue assez éblouissant. L'idée de la piste penchée donne ainsi beaucouop de dynamisme et de force aux cadrages et aux déplacements.
Autre astuce, la progression du sport au cours des 3 matchs. Le premier corespond à un sport violent, dans le genre d'un match de Hockey, mais sans être réellement excessif. Le second, dans lequel les règles disparaissent, dégénère progressivement, tandis que le dernier devient une vraie boucherie, une vraie chasse à l'homme.
"Roolerball", c'sest aussi un film d'anticipation, qui se veut une dénonciation d'une angoisse inhérente au système libéral : le danger représenté par des multinationales en situation de monopole qui, contrôlant les ressources nécessaires au bien-être de l'humainté, écartent les états, devenus inutiles. Sans contre-pouvoir, ces groupes se conduisent en dictateurs, empéchant l'accès à l'information et déresponsabilisant les individus.
Cette partie là a nettemoins moins bien vieilli. Mise en scène soignée, mais bien mollassonne, direction artistique ultra-démodé (trop fort les pyjamas de John Beck et James Caan quand ils sortent du premier match !) et, surtout, c'est long, trop long, et beaucoup trop répétitif dans son propos (la recherche des informations cachées, etc....). Le film ne semble articuler son propos (l'individu apprenant à dire non au système) qu'au troisième quart du métrage. Là-dedans surnagent quelques scènes intéressantes (le retour de la femme de Jonathan, la visite à l'ordinateur...), mais aussi beaucoup de séquences bavardes ou furieusement ringardes (la fête).
Bref, pour moi "Rollerball", cela reste avant tout des séquences d'action futuristes mythiques. Le film sera très influent : on pense au cinéma, bien sûr (et pas seulement la SF : la fin de "Gladiator" est pratiquement similaire en de nombreux points), mais aussi à la BD ("La foire aux immortels" de Bilal) et ou à l'animation (la série "Cobra").
Sur le site, le disque français (sans sous-titres français !) a été testé par Nadia :
http://www.devildead.com/indexfilm.php3?FilmID=51
(et petite précision, si vous voulez parler seulement du remake, merci d'ouvrir un nouveau thread à son sujet !)
Cela va bientôt faire 30 ans que le film de Norman Jewison est sorti sur les écrans. S'inscrivant en droite ligne dans le courant de la SF pessimiste des années 70, il s'inspire notamment d'"Orange mécanique" pour son esthétique léchée, pour la mise en avant de compositions classiques et, surtout, par son approche visuelle, dénonciatrice, mais aussi ambigüe, de la représentation de la violence. Jewison dit vouloir dénoncer son exploitation en tant que spectacle (les joueurs du Rollerball sont clairement les gladiateurs du futur), mais les séquences les plus fameuses restent celles des matchs de Rollerball.
A cela une bonne raison : en adoptant, pour les tourner, une forme documentaire, Jewison leur apporte une vivacité et une authenticité telles qu'on a réellement l'impression d'assister à un match d'un sport réel, authentique. Les trouvailles y sont multiples (l'emploi des motos, le lancement de la balle, etc...) et son approche fétichiste de certains éléments graphiques (cuir, clou) relève d'une esthétique annonciatrice du mouvement punk ou des Mad Max. A ce titre, l'arrivée des joueurs sur le terrain au début du film est un moment d'anthologie.
Les scènes de Rollerball, ce sont aussi des cascades nombreuses et extrêmement réussies, ainsi qu'un travail sur le montage et les prises de vue assez éblouissant. L'idée de la piste penchée donne ainsi beaucouop de dynamisme et de force aux cadrages et aux déplacements.
Autre astuce, la progression du sport au cours des 3 matchs. Le premier corespond à un sport violent, dans le genre d'un match de Hockey, mais sans être réellement excessif. Le second, dans lequel les règles disparaissent, dégénère progressivement, tandis que le dernier devient une vraie boucherie, une vraie chasse à l'homme.
"Roolerball", c'sest aussi un film d'anticipation, qui se veut une dénonciation d'une angoisse inhérente au système libéral : le danger représenté par des multinationales en situation de monopole qui, contrôlant les ressources nécessaires au bien-être de l'humainté, écartent les états, devenus inutiles. Sans contre-pouvoir, ces groupes se conduisent en dictateurs, empéchant l'accès à l'information et déresponsabilisant les individus.
Cette partie là a nettemoins moins bien vieilli. Mise en scène soignée, mais bien mollassonne, direction artistique ultra-démodé (trop fort les pyjamas de John Beck et James Caan quand ils sortent du premier match !) et, surtout, c'est long, trop long, et beaucoup trop répétitif dans son propos (la recherche des informations cachées, etc....). Le film ne semble articuler son propos (l'individu apprenant à dire non au système) qu'au troisième quart du métrage. Là-dedans surnagent quelques scènes intéressantes (le retour de la femme de Jonathan, la visite à l'ordinateur...), mais aussi beaucoup de séquences bavardes ou furieusement ringardes (la fête).
Bref, pour moi "Rollerball", cela reste avant tout des séquences d'action futuristes mythiques. Le film sera très influent : on pense au cinéma, bien sûr (et pas seulement la SF : la fin de "Gladiator" est pratiquement similaire en de nombreux points), mais aussi à la BD ("La foire aux immortels" de Bilal) et ou à l'animation (la série "Cobra").
Sur le site, le disque français (sans sous-titres français !) a été testé par Nadia :
http://www.devildead.com/indexfilm.php3?FilmID=51
(et petite précision, si vous voulez parler seulement du remake, merci d'ouvrir un nouveau thread à son sujet !)
Re: "Rollerball" (1975) de Norman Jewison
Un très bon film d'anticipation trop souvent et injustement considéré comme une simple démonstration de castagnes saignantes.Manolito a écrit : "Roolerball", c'sest aussi un film d'anticipation, qui se veut une dénonciation d'une angoisse inhérente au système libéral : le danger représenté par des multinationales en situation de monopole qui, contrôlant les ressources nécessaires au bien-être de l'humainté, écartent les états, devenus inutiles. Sans contre-pouvoir, ces groupes se conduisent en dictateurs, empéchant l'accès à l'information et déresponsabilisant les individus.
Et une page de publicité (aaaaaaaadoubdoubdoubdoubdoubdoub...) :
Lisez la nouvelle de William Harrison qui a inspiré le film, "Rollerball murder" (dans l'excellente collection "La grande anthologie de la science-fiction" - Livre de Poche n°3817 : "Histoires de l'an 2000")
Fin de la page de pub (aaaaaaaaaaaaaadoubdoubdoubdoubdoubdoubdoub...)
http://branchum.club.fr/an2000.htm
Le Cancre qui rivalise enfin avec les escargots.
La maxime du mois :
"Les ordinateurs, plus on s'en sert moins, moins ça a de chance de mal marcher."
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Plus le temps passe, moins je l'aime.
Trop de blabla et pas assez de baston. Et pour cause: 10 minutes à tout péter se déroulent dans l'arène, alors qu'au moment de lancer la projo, tu n'attends qu'unechose: voir les gladiateurs du futur se fritter la face à coups de gants cloutés.
Pour cette raison, je préfère le McT
Ceci ne veut pas dire que le film est mauvais, mais il ne suscite pas d'enthousiasme en ce qui me concerne.
Trop de blabla et pas assez de baston. Et pour cause: 10 minutes à tout péter se déroulent dans l'arène, alors qu'au moment de lancer la projo, tu n'attends qu'unechose: voir les gladiateurs du futur se fritter la face à coups de gants cloutés.
Pour cette raison, je préfère le McT

Ceci ne veut pas dire que le film est mauvais, mais il ne suscite pas d'enthousiasme en ce qui me concerne.
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Ben quoi, elle est terrible la scène de la fête, furieusement pop et fashion...mais aussi beaucoup de séquences bavardes ou furieusement ringardes (la fête).


Ah ben non t'es dur là, moi j'ai souvenir d'un peu plus que 10mn quand même, la scène finale et le match avec les japonais ça dure quand même un peu, si mes souvenirs sont bon. Mais ce qui aide pas, c'est surtout que le film est peut être un peu trop long (presque 2H)...Trop de blabla et pas assez de baston. Et pour cause: 10 minutes à tout péter se déroulent dans l'arène
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La science-fiction et l’anticipation sont un terreau fertile pour la réflexion autour du développement et de l’évolution de notre société. Une extrapolation d’un présent projeté dans l’avenir afin de stigmatiser nos erreurs du jour. Malheureusement, encore beaucoup de gens ne perçoivent ce genre uniquement par le prisme du vaisseau spatial et de ces grandes épopées qui reposent avant tout sur un imaginaire parfois puéril. Rollerball se situe dans la première catégorie, dans l’anticipation d’une société qui a vampirisé le monde et fait de ces habitants des moutons de panurges.
La société dans le métrage de Jewison est organisée en caste, ou du moins, s’approchant d’un tel schéma. L’organisation géopolitique du monde tel qu’on le connaît, n’existe plus ou presque. En effet, les pays ne sont plus, du moins politiquement parlant, place aux corporations. Ces entités tentaculaires ont pris possession d’un monde et le régule selon un mode prédéfini et applicable à tous sans exception. Pensant trouver là, la représentation de la société parfaite. Les notions de consommations, d’argent et de volonté sont ainsi abolies. Les corporations offrent tout à ses hommes – dans cette représentation, la société est purement misogyne, la femme n’est utilisée que pour satisfaire les hommes – en échange de quoi, la population se soumet aux décisions qui n’ont apparemment rien de bien contraignant. En noyant ses habitants sous un déluge de confort, les corporations endorment, corrompent des hommes à présent soumis au simple plaisir de posséder, à un matérialisme gangrenant leur propre libre arbitre.
Dans ce cadre en apparence idyllique, s’exerce un autre pouvoir, sournois et inattendue. Afin de proposer un exutoire à une populace devenue amorphe de tant de privilèges, est présenté un nouveau sport, l’unique sport ? Ce spectacle largement mise en scène, et retranscrit dans le monde entier, est une nouvelle arme à la disposition des groupuscules gouvernants pour rassembler les gens autour d’un autre élément qu’ils contrôlent de toute part. Mais cet engrenage pourtant bien huilé, va laisser passer un grain qui permet à la machine d’échapper à tout contrôle.
Le sport aujourd’hui est devenu un medium fédérateur très fort. On se regroupe autour du sport, on s’affronte en oubliant les rancoeurs politiques ou religieux, on fait parti d’une liesse célébrant un même but, sans distinction de culture, de race ou de couleur. Plus que l’art de nos jours, le sport a remporté la palme d’une société en manque de repère universel. La vision du rollerball tel qu’il nous est présenté dans le métrage de Jewison répond aux mêmes critères, mais des critères extrapolés jusqu’à l’extrême. Alors que nous sommes spectateurs de nombreux courants sportifs, dans le film, un seul est proposé, diffusé et, pourrait-on ajouter, autorisé. Cette nouvelle discipline sportive emprunte moins au sport que l’on ne reconnaît pas vraiment, qu’aux jeux romains. Comment ne pas reconnaître dans cette arène circulaire, et cette démonstration proche d’un barbarisme primaire, la dernière évolution des jeux de gladiateurs pendant les grandes heures de Rome ? Un jeu qui abolit petit à petit ses règles protectrices pour laisser s’exprimer la sauvagerie d’hommes devenus bêtes.
Le rollerball est une catharsis pour la population, un moyen d’évacuer la violence latente qu’elle porte en son sein. En 1975, Jewison porte un discourt qui pourrait volontiers être repris par les représentants des jeux vidéo, ou même ceux du cinéma lorsque l’on accuse ces médiums d’être responsable de la violence des jeunes. Bien que l’on se situe dans le cadre étriqué d’un film, la réflexion reste pertinente pour qui s’intéresse un peu au problème.
S’il y a bien un élément que les corporations ont omis concernant les hommes, c’est ce besoins viscéral de croire, ce besoins de posséder un héros, une figure représentative capable d’exercer sur eux un pouvoir de fascination proche de la complaisance divine. Les éminences tardent trop l’évidence d’une situation qu’ils n’ont plus sous leur contrôle à cause d’un électron libre, qui refuse de se plier au bon vouloir de ces patrons. Un simple joueur de rollerball devient au terme d’une lutte enragée qui a vu ces considérations humaines régresser à un stade animal où l’instinct de survie était l’unique considération prise en compte, le représentant d’un peuple, la figure héroïque que certains réclamait. Devenant ainsi, l’ennemi principal des corporations, ces entités qui ont annihilé tout propension à s’émouvoir ou ressentir quelques émotions (voir comment les relations hommes/femmes sont traitées).
Jewison place sa caméra au centre des enjeux, là où il peut être le plus prêt des personnages. Non seulement il gagne une incroyable énergie pendant les phases de jeu, mais il permet également une empathie absolue pour les personnages déambulants dans des décors aseptisés et quelque part, effrayant et déshumanisant. Il dépeint un monde froid, désincarné où l’ordre dans sa conception la plus rigide semble primer. Aucune notion de police, ou de violence autre que dans le sport, aucune notion de loi également ne peuple le métrage. Sans donner dans de long discours léthargique expliquant le monde en place, le réalisateur le construit par ces absences, et par une économie de lieux visités. Pour satisfaire cette apathie qui sous tend toute cette société, il a recours à des artifices ingénieux, qui ne souffrent guère du temps qui passe (hormis le design très seventies évidemment). Bien que le film annonce une baisse de rythme à cause d’une séquence superflue – la visite inutile à Genève qui encombre le métrage par son ton légèrement drôle qui ne siée pas au ton général du métrage – Jewison fait preuve d’un vrai savoir faire dans la gestion de son film. Nerveux dans les séquences sportives, posé et lourd quand il affronte le quotidien, le film joue sur ces antagonismes pour atteindre son but et sa réflexion.
Rollerball est un film relativement nihiliste mais qui ne bouche pas son horizon pour autant. En laissant l’intrigue encore en construction, il laisse aux spectateurs le choix de continuer ou non, de définir l’évolution du récit selon ses propres considérations, et ce qu’il a pu ressentir pendant le métrage. Bien plus qu’un simple film sur un sport violent et barbare, le film se veut un profonde réflexion sur un monde en devenir, ainsi que la peinture du sport « à notre époque » et son importance auprès de la population. Le rollerball est l’opium du peuple, les sports divergent selon les pays, mais peut-on craindre d’arriver un jour à ce genre de considération ? Jewison n’apporte pas de réponse, c’est à nous d’entreprendre la réflexion. Décidément, la science-fiction ou l’anticipations sont un formidable terreau pour ce genre de pensée…
La société dans le métrage de Jewison est organisée en caste, ou du moins, s’approchant d’un tel schéma. L’organisation géopolitique du monde tel qu’on le connaît, n’existe plus ou presque. En effet, les pays ne sont plus, du moins politiquement parlant, place aux corporations. Ces entités tentaculaires ont pris possession d’un monde et le régule selon un mode prédéfini et applicable à tous sans exception. Pensant trouver là, la représentation de la société parfaite. Les notions de consommations, d’argent et de volonté sont ainsi abolies. Les corporations offrent tout à ses hommes – dans cette représentation, la société est purement misogyne, la femme n’est utilisée que pour satisfaire les hommes – en échange de quoi, la population se soumet aux décisions qui n’ont apparemment rien de bien contraignant. En noyant ses habitants sous un déluge de confort, les corporations endorment, corrompent des hommes à présent soumis au simple plaisir de posséder, à un matérialisme gangrenant leur propre libre arbitre.
Dans ce cadre en apparence idyllique, s’exerce un autre pouvoir, sournois et inattendue. Afin de proposer un exutoire à une populace devenue amorphe de tant de privilèges, est présenté un nouveau sport, l’unique sport ? Ce spectacle largement mise en scène, et retranscrit dans le monde entier, est une nouvelle arme à la disposition des groupuscules gouvernants pour rassembler les gens autour d’un autre élément qu’ils contrôlent de toute part. Mais cet engrenage pourtant bien huilé, va laisser passer un grain qui permet à la machine d’échapper à tout contrôle.
Le sport aujourd’hui est devenu un medium fédérateur très fort. On se regroupe autour du sport, on s’affronte en oubliant les rancoeurs politiques ou religieux, on fait parti d’une liesse célébrant un même but, sans distinction de culture, de race ou de couleur. Plus que l’art de nos jours, le sport a remporté la palme d’une société en manque de repère universel. La vision du rollerball tel qu’il nous est présenté dans le métrage de Jewison répond aux mêmes critères, mais des critères extrapolés jusqu’à l’extrême. Alors que nous sommes spectateurs de nombreux courants sportifs, dans le film, un seul est proposé, diffusé et, pourrait-on ajouter, autorisé. Cette nouvelle discipline sportive emprunte moins au sport que l’on ne reconnaît pas vraiment, qu’aux jeux romains. Comment ne pas reconnaître dans cette arène circulaire, et cette démonstration proche d’un barbarisme primaire, la dernière évolution des jeux de gladiateurs pendant les grandes heures de Rome ? Un jeu qui abolit petit à petit ses règles protectrices pour laisser s’exprimer la sauvagerie d’hommes devenus bêtes.
Le rollerball est une catharsis pour la population, un moyen d’évacuer la violence latente qu’elle porte en son sein. En 1975, Jewison porte un discourt qui pourrait volontiers être repris par les représentants des jeux vidéo, ou même ceux du cinéma lorsque l’on accuse ces médiums d’être responsable de la violence des jeunes. Bien que l’on se situe dans le cadre étriqué d’un film, la réflexion reste pertinente pour qui s’intéresse un peu au problème.
S’il y a bien un élément que les corporations ont omis concernant les hommes, c’est ce besoins viscéral de croire, ce besoins de posséder un héros, une figure représentative capable d’exercer sur eux un pouvoir de fascination proche de la complaisance divine. Les éminences tardent trop l’évidence d’une situation qu’ils n’ont plus sous leur contrôle à cause d’un électron libre, qui refuse de se plier au bon vouloir de ces patrons. Un simple joueur de rollerball devient au terme d’une lutte enragée qui a vu ces considérations humaines régresser à un stade animal où l’instinct de survie était l’unique considération prise en compte, le représentant d’un peuple, la figure héroïque que certains réclamait. Devenant ainsi, l’ennemi principal des corporations, ces entités qui ont annihilé tout propension à s’émouvoir ou ressentir quelques émotions (voir comment les relations hommes/femmes sont traitées).
Jewison place sa caméra au centre des enjeux, là où il peut être le plus prêt des personnages. Non seulement il gagne une incroyable énergie pendant les phases de jeu, mais il permet également une empathie absolue pour les personnages déambulants dans des décors aseptisés et quelque part, effrayant et déshumanisant. Il dépeint un monde froid, désincarné où l’ordre dans sa conception la plus rigide semble primer. Aucune notion de police, ou de violence autre que dans le sport, aucune notion de loi également ne peuple le métrage. Sans donner dans de long discours léthargique expliquant le monde en place, le réalisateur le construit par ces absences, et par une économie de lieux visités. Pour satisfaire cette apathie qui sous tend toute cette société, il a recours à des artifices ingénieux, qui ne souffrent guère du temps qui passe (hormis le design très seventies évidemment). Bien que le film annonce une baisse de rythme à cause d’une séquence superflue – la visite inutile à Genève qui encombre le métrage par son ton légèrement drôle qui ne siée pas au ton général du métrage – Jewison fait preuve d’un vrai savoir faire dans la gestion de son film. Nerveux dans les séquences sportives, posé et lourd quand il affronte le quotidien, le film joue sur ces antagonismes pour atteindre son but et sa réflexion.
Rollerball est un film relativement nihiliste mais qui ne bouche pas son horizon pour autant. En laissant l’intrigue encore en construction, il laisse aux spectateurs le choix de continuer ou non, de définir l’évolution du récit selon ses propres considérations, et ce qu’il a pu ressentir pendant le métrage. Bien plus qu’un simple film sur un sport violent et barbare, le film se veut un profonde réflexion sur un monde en devenir, ainsi que la peinture du sport « à notre époque » et son importance auprès de la population. Le rollerball est l’opium du peuple, les sports divergent selon les pays, mais peut-on craindre d’arriver un jour à ce genre de considération ? Jewison n’apporte pas de réponse, c’est à nous d’entreprendre la réflexion. Décidément, la science-fiction ou l’anticipations sont un formidable terreau pour ce genre de pensée…
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