Gros scandale en Italie et en Angleterre en 1978 où il fut coupé de pas moins de 10 mn, Piccole labbre/Histoire d'Eva, réalisé par Mimmo Cattarinich se rapproche assez de La petite de Louis Malle et il est alors facile de parler de pédophilie à la vision du film.
Contrairement à La maladolescenza / Jeux interdits de l'adolescence



Vu son impuissance, il ne peut se donner à elle et vit cet amour interdit au travers de fantasmes ce qui nous vaut d'étonnantes séquences de rêves desespérées et torturées où Paul photographie Eva, nue, consentante et se laisse aller à ses fantasmes les plus osés, scènes surréalistes un peu à la Lewis Carroll où certains pourront y voir des influences Hamiltonniennes.
De ces photos, il en fait un livre intitulé Histoire d'Eva (Clin d'oeil au livre D'irina Ionesco?).
Derrière cette imagerie scabreuse érotico-infantile pour reprendre un terme utilisé par la critique italienne, que Cattarinich film sans honte, Piccole Labbra- petites lèvres en français- est avant tout l'histoire d'un homme désespéré qui n'attend plus rien de la vie, un homme mort avant d'être mort, la saga douce-amère d'un amour dont on ne peut citer le nom.
Eva n'est qu'une version perverse de la Lollita, d'autant plus perverse qu'elle se laisse aimer par cet homme mais sera vite fascinée par un jeune gitan, acrobate dans un cirque ambulant qui déflorera l'enfant.
Surpris lors de l'acte par Paul, il ne s'en remettra pas, ayant perdu sa seule raison de vivre.
Proche de la folie, celle du desespoir, il se suicidera en se tirant une balle dans la tête aprés avoir fini son livre en y écrivant les ultimes lignes, terrible conclusion sur le sort de la vie, sa vie, résumant toute sa détresse.
Sombre, désespéré , tragique, audacieusement érotique, Histoire d'Eva pourra déranger et faire crier à la tentation pédophile mais il n'y a aucun acte sexuel entre enfant et adulte, juste des fantasmes aussi poussés soient ils, Cattarinich ne laissant planer aucun doute sur les désirs implicites mais clairs de Paul. Mais ici, c'est un adolescent qui volera la virginité de l'enfant
Tout comme dans La maladolescenza, la petite Eva ( Autre clin d'oeil à Eva Ionesco?) joue le plus souvent nue et cette omni-présence de nudité pré-adolescente peut choquer d'autant plus que le réalisateur glisse sa caméra sous la robe de sa jeune actrice, filme son entre jambe avec soin et poésie, caresse ses formes naissantes avec son objectif de velours, la prend au bain face au miroir, soulignant ses seins bourgeonnnant..
Le film bénéficie d'une superbe photographie et d'une interprétation de qualité.
La BO de Stelvio Cipriani est envoûtante et contribue beaucoup à la force du film. Cattarinich a mis également beaucoup de sensibilité dans cette histoire.
C'est Katya Berger alors 12 ans, fille de l'acteur William Berger, qui joue avec beaucoup de conviction et d'audace le rôle d'Eva, une Katya au physique plutot ingrat, qui est loin d'avoir la beauté d'Eva Ionesco qui la faisait ressembler à une poupée de porcelaine.
Paul est interprété par le précieux et Pasolinien Pierre Clementi

Non crédité au générique, on reconnaitra Michele Soavi alors tout ado, dans le rôle du jeune acrobate.
Piccole labbra est un film éblouissant, cruel, désespéré, à voir au délà de l'imagerie qu'il renvoie, un petit chef d'oeuvre comme l'Italie sut en faire. Eric est aux anges


Le film de Cattarinich pourra choquer, c'est sûr, et par conséquent contrairement à Spermula et La maladolescenza afin d'éviter tout remous, je ne donnerai aucun détail et laisserai découvrir ce film par vous même.
Le corbeau qui a de petites lèvres mais de grandes ailes

