Les proies / The bequiled c'est l'histoire de McBey, soldat yankee qui agonisant est récueilli par une petite fille qui le ramène à la pension pour jeunes filles à laquelle elle appartient.
Minuscule communauté de femmes tournant autour de la directrice, son assistante, la cuisinière noire et une dizaine d'adolescentes, les pensionnaires vont le soigner clandestinement jusqu'à son rétablissemnt. Seul homme, viril soldat, dans ce microcosme, il va bientot attirer la convoitise, comblant les fantasmes et désirs inavoués et refoulés de ces femmes et nourrir les appetits sexuels naissants des adolescentes jusqu'au terrible drame...
Voila en effet un magnifique film, fort et trouble, veneneux et dramatique où Siegel réussit parfaitement à mettre en scéne cet univers étouffant de pensionnat pour jeunes filles, etablissement clandestin en pleine guerre de cessession, créant un climat de plus en plus moite, une tension allant crescendo jusqu'au drame final, terrible et tragique.
Les proies se sont ces femmes et ses jeunes adolescentes, fillettes pré-adolescentes et adolescentes pas encore femmes vivant dans un cercle fermé, coupé du monde.
L'incursion de ce soldat ennemi dans cet univers va bouleverser le quotidien paisible de la communauté, objet à fantasme et de désir de la part ces femmes toutes plus frustées les unes que les autres, cachant le vice sous leur bonnes manières.
C'est la directrice, femme apparemment froide et forte qui vit dans le souvenir trouble de son frère décédé, frère à qui elle vouait un amour quasi incestueux à moins qu'il ne s'agisse de son amant qu'elle fit passer pour son frère afin d'assurer et communiquer à ses élèves le mépris qu'elle a pour les hommes.
C'est son assistante, virginale et sainte-nitouche, qui des hommes ne connait que son père, menteur ehonté.
Ce sont ces fillettes dont la petite Amy qui connaissent les premiers emois de leur sexualité ou les plus grandes comme Carol qui n'attendent plus que de se jeter sur cet homme avant de connaitre l'amour.
C'est enfin la haine des autres filles pour qui il represente l'ennemi, le danger, l'être à tuer.
Dans ce climat équivoque, sous le soleil et aux lueurs des chandeliers, McBey est comme un ange au Paradis, ses instincts d'homme pouvant être ainsi satisfaits sans honte, chacune l'attisant à sa façon, plus ou moins surnoise.
A ce climat équivoque s'ajoute la jalousie sourde, haineuse, chacune s'épiant et se laissant aller.
De la directrice attendant qu'il franchisse sa porte la nuit, en proie à de terribles rêves interdits sous le regard offensé de Dieu et de l'image de son frère s'interposant, de l'assistante transie ne pensant plus qu'à perdre enfin sa virginité aux élèves dont la petite Amy révant de cet homme-père l'embrassant sur la bouche à la torride Carol qui se donnera à lui, le drame est proche.
Et le drame c'est lorsque l'assistante decouvrira Carol faisant l'amour. Folle de haine, elle blessera mortellement McBey qui devra être amputé d'une jambe, début d'un long cauchemar pour ces femmes.
Les proies devient un film cruel, la cruauté de ces femmes toutes rivales mais désormais devant faire face ensemble à la cruauté de cet homme mutilé se mélant à la cruauté de l'enfance.
Siegel se permet un final absolumment superbe, riche en suspens, violent ainsi qu'une magnifique séquence de chirurgie peut être pas trés graphique mais suffisamment suggérée pour faire crisser les dents.
Beneficiant d'une excellente mise en scene, solide, irreprochable et d'une trés belle photographie, cette histoire cruelle qui parfois flirte avec le fantastique bénéficie également d'une interprétation sans faille de Clint Eastwood, Geraldine Page en directrice froide et frustrée, Eliabeth hartman en assistante virginale et jalouse ainsi que de la jeune Jo Ann Harris

en adolescente aguicheuse et torride, véritable garce offrant son petit derrière nubile et ses petits seins laiteux à un Eastwood sans remord lors d'un plan sexe totalement frémissant.
Les plus érudits reconnaitront une petite fille, une certaine Melody Scott devenue depuis Melody Scott-Thomas qui depuis 30 ans est désormais la célébre Nikki Newman, épouse du célebre Victor Newman dans les Feux de l'amour!
La Scott se targuant aujourd'hui d'avoir été serrée dans ses bras par Eastwood dans ce film où elle n'a quasiment qu'un personnage de figurante.
Véritable petit bijou, Les proies, film flou et cruel, suffocant, est un réel régal qui tiendra en haleine jusqu'à l'ultime minute.