Annibale est un vieux libertin ayant amassé une fortune considérable en dirigeant plusieurs maisons closes. Sentant sa fin proche, il souhaite faire de son petit fils Andrea son seul héritier. Lorsqu’il apprend de son frère jumeau, l’évêque Nestor, que celui-ci, toujours puceau à 25 ans, souhaite devenir prêtre, Annibale pique une colère noire. Il annonce alors que si Andrea ne renonce pas à sa vocation et ne goute pas avant sa mort aux plaisirs de la chair il modifiera son testament ; son argent ira à la construction d’une maison de repos pour prostituées à la retraite. Voyant filer leur héritage, Teodoro et Iliana, les parents d’Andrea, ainsi que tous ceux vivant aux crochets du vieux milliardaire, décident de réagir : Andrea va devoir se faire dépuceler au plus vite. Mais ce n’est pas chose aisée car il faut auparavant régler le complexe œdipien du jeune homme, encore très amoureux de sa mère …

A ma connaissance l’une des rares incursions de Joe D’amato dans le registre de la comédie. Ecrite par George Eastman, cette étude de mœurs tirant au bazooka sur la bourgeoisie italienne et l’église, comme cela était fréquent – pour ne pas dire systématique - à l’époque, reprend la trame du Malizia de Samperi, le classique de ce sous-genre italien, mais en l’inversant. Ici ce n’est pas un élément dépravé qui va pervertir une famille de culs bénis, mais une famille de bourgeois dépravés, ayant bâti leur fortune dans les maisons closes, qui va tenter, avec la bénédiction de l’église, de débaucher son seul élément encore coincé du derche (plus précisemment le petit fils puceau qui souhaite rentrer au séminaire). Situation inédite et amusante à laquelle vient se greffer une histoire de trauma freudien un peu plus tordue, permettant notamment à D’amato de nous livrer une curieuse séquence onirique rappelant, en nettement plus soft dans le contenu, celle mémorable d’Emanuelle e Françoise le sorelline, film qu'il avait signé l’année précédente.
Dire que Voto di castità (pouvant se traduire par Voeux de chasteté, il me semble) est un film d’une grande finesse serait un gros mensonge auquel personne ici ne croirait de toute façon. La critique sociale se vautre dans la caricature la plus facile et les gags sont le plus souvent énormes (cf. ce gag récurrent avec le père d’Andrea, chimiste en herbe, dont les solutions lui pêtent régulièrement à la figure). Quant aux comédiens, ils en font des caisses, Jacques Dufilho le premier, ici à des années lumières du cinéma de Sautet et Chabrol, dans un double rôle de pervers pépère / archevêque peu scrupuleux. A noter également la présence de Laura Gemser dans un second rôle, interprétant la bonne française de la famille. Il s’agit apparemment de sa première collaboration avec D’Amato.
Bref, Voto di castita c’est de la grosse cuisine qui tâche, mais il y a tout de même un agréable souffle de folie libertaire qui passe sur tout ça. Et puis, à tout prendre, dans le registre critique bourgeoise, je préfère encore mille fois ça aux essais tiédasses d’un Chatiliez. Vu sur une copie VHS malheureusement recadrée et amputée d’une petite dizaine de minutes (le film fait 95 minutes, la version que j’ai vu 86 seulement), qui évacue ou raccourci drastiquement les séquences les plus croustillantes du métrage (enfin, c’est l’impression que ça donne).