Stealing beauty - Bernardo Bertolucci (1996)

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manuma
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Stealing beauty - Bernardo Bertolucci (1996)

Message par manuma »

C'est sur l'invitation de Diana et Ian Grayson que Lucy Harmon, une jeune américaine de 19 ans, vient passer ses vacances en Toscane. Le lieu est une villa magnifique où sa mère, qui vient de se suicider, avait l'habitude de partager sa vie avec la petite communauté d'artistes anglo-saxons des Grayson : Alex Parrish, écrivain gravement malade, Noemi, une femme mûre encore très sensuelle, Carlo, correspondant de guerre, M.Guillaume, un ancien marchand d'art. La présence de Lucy ne va pas tarder à secouer ce petit groupe de soixante-huitards endormis.

Image


Ce Bertolucci, qui marquait véritablement le retour du cinéaste sur sa terre natale 15 ans après La Tragédie d'un homme ridicule, me laisse finalement assez perplexe. L'ensemble est loin d'être désagréable à suivre. Dans la forme - lumières, décors, photo - c'est même un régal pour les yeux. Que du plaisir également du côté de la bande-sonore, conviant notamment John Lee Hooker, Portishead, Cocteau Twins, Billie Holiday et Stevie Wonder à illustrer des séquences où l'image s'accorde harmonieusement à la musique (Bertolucci a toujours été fort dans ce domaine, je trouve). La distribution, mélangeant interprètes italiens, anglais, américain, irlandais et français, vaut assuremment le détour. Enfin, il y a même quelques jolis moments de mise en scène (la scène de la révélation sur l'identité du père de Lucy ou celle de la défloration de l'héroïne).

Mais voilà, ça s'arrête à peu près à cette belle mise en image car côté scénario on a en fait pas grand-chose à se mettre sous la dent. Que la trame ne soit pas très recherchée, ce n’est pas très important. On a déjà fait des bons films avec moins que ça. Mais à défaut d’une intrigue originale ou très élaborée, on était en droit d’espérer des personnages intéressants et fouillés. Et c’est loin d’être le cas ici. Sorti du personnage de Liv Tyler, le seul relativement soigné, tous les autres sont survolés et alignent tous les clichés au rayon portraits d'artistes / hommes de lettres post-soixante-huitards désabusés. Plus grave, alors qu'en d'autres temps Bertolucci ne se serait pas privé d’épingler cette belle bande d’intellos oisifs, il laisse ici curieusement passer l'occasion et les traite avec beaucoup de complaisance (à l’exception du personnage de l’avocat pour stars, bellâtre dominateur caricatural au possible). Du coup on se demande franchement ce qui a poussé le réalisateur d'œuvres aussi fortes, provocantes et exigeantes que 1900, La Luna ou Un Thé au Sahara à signer cette bluette romantique décorative et sans surprise, dont les quelques audaces s'avèrent bien timides en comparaison de celles précédemment rencontrées dans le cinéma de Bertolucci. A noter que c’est le dernier film de Jean Marais (qui a à peine 10 répliques dans le film, dans un personnage de vieux bougon un peu gâteux totalement survolé) et l’un des derniers de l’excellent acteur irlandais Donal McCann.
Manolito
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Re: Stealing beauty - Bernardo Bertolucci (1996)

Message par Manolito »

Après une succession de films brassant épique et intimisme (Le dernier empereur, Un thé au sahara, Little Buddah), "Beauté Volée" avait provoqué de fortes attentes en son temps, avec un Bertolucci retournant en Italie pour un cinéma supposé renoué avec ses années 70. Patatra, ce fut une déception, une chronique de vacances estivales mi-intello, mi-paresseuse, ne pouvant même pas se prévaloir de qualités visuelles aussi spectaculaires que les précédentes fresques. Un film presque cucul dans sa façon de dépeindre l'éveil sensuel de son personnage principal (c'était le premier grand rôle "sérieux" de Liv Tyler)... Bref, un film oubliable et d'une certaine façon, le début de la fin pour celui qui fut un maître du cinéma européen, un cinéaste dont l'importance reste encore aujourd'hui assez sous-estimé à mon sens... Mais pour ce film là, une déception...
manuma
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Re: Stealing beauty - Bernardo Bertolucci (1996)

Message par manuma »

Manolito a écrit : Un film presque cucul dans sa façon de dépeindre l'éveil sensuel de son personnage principal
Oui, ça en est assez génant, surtout venant de Bertolucci. Et puis franchement, on ne pige pas bien pourquoi tout le monde s'extasie comme ça sur le personnage de Tyler, jeune fille jolie certes, mais pour le reste mais tout ce qu'il y a de plus banale.

J'avais oublié de signaler qu'entre 2 scènes carte postale Bertolucci se rappelle quand même qu'il fut un cinéaste engagé et lance une petite attaque contre la télévision italienne, via une séquence où sa fine équipe s'insurge contre la pose d'une antenne télé au milieu d'un champ. Et le moins que l'on puisse dire là dessus, c'est que cette digression, totalement anecdotique au sein du récit, manque de subversion.
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