
Inspiré d'un fait réel qui a divisé l'Amérique, dont il ne reprend que les grandes lignes, Inherit The Wind est un vrai tour de force : réussir à passionner un auditoire sur 128 minutes dans un film de procès plutôt statique. Des acteurs possédés par leur rôle, dotés de dialogues percutants, fins et parfois terrifiants et des seconds rôles finement dessinés.
Le film repose tout d'abord sur un affrontement de titans entre l'avocat et le procureur qui se balancent jusqu'à des horreurs, au prix de dépasser même leur propre pensée. C'est néanmoins brillant et maintient une pression assez terrible, le film possédant quelques climax assez redoutables quant à l'interrogation des témoins. Voir la scène où la fiancée du professeur, fille du pasteur du coin, va être coincée dans les paroles qu'elle a malencontreusement lâché au procureur après une séance de prière. Ou l'interrogatoire final entre les deux hommes, anthologique!
Le film garde un aspect étonnamment moderne, tant la théorie de l'évolution est toujours battue en brèche au profit de la Génèse 85 ans après les faits dans de nombreux états américains... mais c'est surtout le courage de monter un tel projet à Hollywood en 1960! Ce n'est pas tant sur la religion et la Bible que se base Tracy pour la défense mais bien sur la liberté de penser et de s'exprimer.
Des scènes sont par contre trop caricaturales pour aller dans un sens vraiment objectif sur les personnages. Brady est un bon vivant qui ne jure et voit la vie qu'à travers la B ible, ses enseignements et son contenu, quitte à le prendre au pied de la lettre, jusque dans ses contradictions. Mais l'interprétation de Fredric March (attention, il est excellent) est trop appuyée pour être honnête... le spectateur va naturellement vers le côté posé et braillard de Tracy, défenseur de l'opprimé... idem pour la scène de prière nocturne, en studio, où le pasteur harangue la foule sur la création du monde en 7 jours qui se finit en monument de fanatisme que même Brady interrompt de par la terreur générée. Idem pour les scènes de liesse populaire où les deux chansons religieuses sont répétées ad nauseam. On sait que la vindicte populaire et l'effet de groupe peut mener à tous les extrêmes (voir les récentes photos de pendaisons de noirs dans les années 20 exposées au festival d'Arles récemment) mais c'est un peu beaucoup ici...
Des mouvements de caméra judicieusement choisis, des placements d'acteurs précis, la msie en scène )à priori sans relief de Kramer prend toute sa dynamique dans les scènes de dialogues, bénéficiant de plans séquences solidement ancrés dans la mécanique du suspense.
Par contre, si le discours contre l'obscurantisme biblique est asséné régulièrement pendant le film et que la liberté d'expression est mise en danger de par des lois iniques et dangereuses, le film recule sur la fin. Comme débordé par tant de véhémence de part et d'autre, Kramer devient tout timide et décide de ne pas choisir. Et c'est en fait le personnage cynique
Spoiler : :
Pirouette scénaristique un peu facile qui fait la part belle aux joutes politiques et à la dénonce du journalisme, au regard des enjeux. une déception, en somme, vue la charge déployée pendant deux heures. Mais un film tout de même tonitruant (voire trop démonstratif) dans le débat d'idées et dominé par la performance de vrais monstres de cinéma que sont Tracy et March. Le film rejoint ainsi le cycle de films de procès social qui a vu ses premières heures de gloire à la fin des années 50/debut 60 avec le Compulsion de Richard Fleischer ou encore To Kill a Mockingbird avec Gregory Peck.... et Stanley Kramer, habitué aux "grandes causes", remettra le couvert l'année suivante pour Jugement à Nuremberg.
Vus sur le Z1 MGM, 1.66:1 et NB, 2H08, sans 16/9, copie un peu granuleuse... j'ai vu un titre en VF "procès de singe" mais il me semble qu'il y en avait un autre?