Attends y en a encore sur LE HOBBIT et le ciné US actuel:
Alejandro Jodorowsky:
"Le cinéma est en pleine décadence. ça va devenir une immense manifestation industrielle et c'est tout.
ça ne changera plus la vie de personne. C'est comme la cigarette: elle te calme mais elle te tue. Le cinéma te calme mais tu rentres idiot, tu sors idiot. Il n'arrange pas ta vie. Il te distrait une heure et demie et c'est tout. C'est un repos, une récréation. AVATAR, c'est 400 millions de dollars de budget et je l'ai déjà oublié.
Les seules choses qui me restent, ce sont de grands Schtroumpfs qui courent et une histoire de cow-boys.
Ou alors, tu te retrouves avec des films comme LE HOBBIT. C'est un film de célibataire. Bilbon vit tout seul et il se retrouve à la fin à combattre le dragon qui est un ersatz de l'oncle de Donald Duck, Picsou.
Tous les films, maintenant, traitent du combat pour l'argent"
Walter Hill:
"L'important est la personnalité de l'artiste, pas sa virtuosité technique. Je vais parler comme un vieil homme, mais j'en suis un de toute façon:
les films d'aujou'd'hui manquent d'individualité, en particulier les gros trucs à effets spéciaux, qui sont des longs-métrages d'entreprise qui se ressemblent tous. Du coup, vous ne pouvez plus travailler chez les grands studios, avec les films que je veux faire. Je crois que mon temps avec les studios est terminé.
Au bon vieux temps, qui était en fait mauvais, il y avait quand même une bonne chose. Vous y alliez, vous racontiez votre histoire. Ils vous disaient "non" la plupart du temps, mais ils vous disaient parfois "oui" et le film se faisait. Car à l'époque les studios fabriquaient eux-mêmes leurs produits.
Maintenant, un générique commence avec onze logos différents. Cela veut dire que vous aurez au moins cinq réunions avec chacun de ces logos, où tout le mone dira "oui". Mais ce "oui" ouvre seulement sur d'autres réunions, pouvant très bien aboutir à un "non" final. Et mis à part les cinéastes dont le dernier film a engrangé 200 millions de dollars, tout le monde est sur le même bateau."
John Landis:
"Il n’y a pas d’idée originale. Le truc – et c’est ce que personne ne comprend – c’est qu’il n’a jamais été question de l’idée mais de la façon dont on exécute l’idée. Les studios ne sont maintenant plus que les sous-divisions d’énormes multinationales.[…] Time Warner, British Petroleum, Sony, ce ne sont pas des compagnies, ce sont de putains de nations. Ce sont ces énormes entités internationales qui ne payent pas d’impôts. C’est ridicule. On dirait des pirates. Ils doivent vraiment être désespérés parce comme ils ne savent plus comment attirer les gens dans les salles, ils nous ressortent la 3D et tout ce genre de merdes. […] C’est devenu commun aujourd’hui de dépenser plus d’argent dans le marketing d’un film que dans le film lui-même. Et donc la raison pour laquelle ils font toutes ces suites et ces remakes est qu’ils créent des marques, comme Coca-Cola. […] Il y aura toujours de bons films. C’est juste de plus en plus dur de les voir. Et comme les studios ne sont plus intéressés par faire de bons films – ce qui les intéresse ce sont les films qui attirent du public. Et donc vous avez des films comme AVATAR, ou GRAVITY. C’est super à regarder mais, maintenant, est-ce que ce sont de bons films ? Non ! Mais c’est divertissant, c’est spectaculaire et techniquement époustouflant. […] Tout a changé. Steve Jobs a détruit l’industrie de la musique. Il a décidé qu’une chanson valait 20 cents, comme ça (il claque des doigts) Boum. Détruit. Donc, tout a changé. Il n’y a pas de méchants. Personne ne maîtrise. Je comprends pourquoi ils sont effrayés. Toutes leurs décisions sont basées sur la peur."
Alan Parker:
"Avant, la réalisation d'un film était un acte politique. Ce n'est plus le cas. Le cinéma grand public d'alors abordait des thèmes politiques importants. J'ai essayé de faire ça au sein du système américain avec des films comme Mississipi Burning sur le racisme, ou Midnight Express, La Vie de David Gale sur la peine de mort. On ne fait plus ce type de films. Pour les studios américains, c'est une question d'argent. Leur unique but est de toucher le public le plus large possible afin de gagner le plus d'argent possible. C'est leur seule raison de faire des films. Les 14 films que j'ai réalisés l'ont été pour de bonnes raisons. Personne ne m'a dit quoi faire."
(...)
"Pour être franc, Hollywood n'a plus aucun intérêt.
Dans les années 80-90, chaque studio produisait encore des drames, des blockbusters, des petits et des grands films pour séduire l'ensemble du public. Aujourd'hui, l'ensemble de la production est concentré sur les jeunes spectateurs. Tout est action, superhéros et effets spéciaux.
Mon fils adore tous ces CAPTAIN AMERICA, mais moi non. Je rêve à ce que pourrait produire Christopher Nolan aujourd'hui s'il n'avait pas à intégrer dans ses films, la nécessité de faire beaucoup d'entrées. J'aimerais le voir mettre en scène un film avec seulement trois millions de dollars.
Prenez Peter Jackson: il a une entière liberté de création, reçoit tout l'argent qu'il souhaite mais uniquement parce qu'il fabrique des blockbusters.
Il fait ce qu'Hollwyood attend de lui, pas un film sur le racisme en Nouvelle Zélande!
C'est la même chose avec Ridley et Tony Scott lorsqu'il était de ce monde. Nous n'avons pas suivi exactement le même chemin. Ils sont davantage entrés dans le système, ils ont intégré la nécessité de réaliser des films à grand succès.
Ridley Scott est un metteur en scène surdoué, sûrement l'un des plus influents de sa génération, mais il a fait de très mauvais films car il n'a plus rien à dire. Aujourd"hui, il est plus intéressé par la forme que par le fond."
Propos de cinéastes désabusés, aigris et/ou lucides

recueillis dans So Film et les documentaires cinéastes des années 80 réalisés par Jean Pierre Lavoignat...