Victim - Basil Dearden (1961)

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Superwonderscope
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Victim - Basil Dearden (1961)

Message par Superwonderscope »

Poursuivi par la Police, le jeune Barrett (Peter McEnery) décide de fuir la Grande Bretagne. Empaquetant en vitesse ses affaires, il cherche à joindre plusieurs personnes dont le célèbre avocat Farr (Dirk Bogarde), mais tout le monde refuse de lui venir en aide. Rattrapé par la police, il avoue avoir volé quelques 2300 £, mais surtout, semble l'avoir fait car victime d'un chantage. Refusant toute parole il finit par se suicider dans sa cellule.

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Véritable film choc lors de sa sortie, il s'agissait d'un pari risqué. Dirk Bogarde était une star extrêmement populaire au Royaume Uni(notamment via la série de films Doctor in the House) et le fait d'accepter le role de Farr allait bouleverser grandement sa vie et sa carrière.
En effet, il s'agissait dupremier fil à traiter ouvertement d'un personnage homosexuel, et ce de manière positive. Farr est d'autant plus marqué qu'il est marié à Sylvia Sims et qu'il a vécu une relation extra-maritale avec le jeune Barrett.

1961 voyait surtout une loi britannique ( dite "anti-sodomie") dure qui, dans ses retranchemes, jetait en prison les homosexuels déclarés. 90% des victimes de chantage étaient à l'époque justement des homosexuels. Profitant du système, les aîtres chanteurs se voyaient protégés car jamais leurs victimes ne porteraient plainte, de peur de se voir au pire eux aussi jetés en prison.

Construit à la manière d'un thriller, Farr réalise en effet que le jeune Barrett, amoureux de lui, tentait de le protéger lui et sa carrière. Son suicide le lui prouvait. il va donc tentr de résoudre le mystère de qui se cache derrière toute cette machination.

Le film dépeint de manière assez réaliste la peur de chacune des victimes. Un coiffeur vieillissant qui a déjà été 4 fois en prison et qui veut émigrer au Canada, un acteur célèbre (un Dennis Price impeccable) qui a peur pour sa carrière, un homme politique, un libraire... le tout en évitant les clichés de représentativité de la "communauté" gay de l'époque. A savoir des asociaux, des psychopathes, des prédateurs... bien au contraire, c'est le discours adulte de chaque protagoniste qui étonne. La conscience de ce qu'ils sont, de leur condition, de leur liberté d'aimer comme ils le souhaitent. Mais tous considèrent ce chantage comme un prix logique à payer, qu'ils acceptent bon gré mal gré. Sauf Farr qui est pret à sacrifier sa vie de famille, sa carrière afin de faire changer les choses.

Même si quelques dialogues dénotent de l'année où le film a été réalisé, c'est le propos résolument moderne du sujet et de son traitement qui étonne 46 ans après.

Ce qui n'empeche pas quelques scories mélodramatiques un peu trop appuyées. La caméra qui s'avance lentement sur le visage décomposé des victimes, appuyé d'un coup de violon au bon moment. Ce qui tranche d'ailleurs avec ce côté très assuré de la démarche de l'avocat.

Joli couple Bogarde/Sims, d'ailleurs, bien au centre du film. Le scénario résiste justement à la tentation mélo, une tradition plus américaine d'ailleurs, de voir la femme qui verrait envoyer tout balader. Digne et plutot sbre, l'interprétation de Sylvia Sims la voit grandie de l'éxprience même si elle sait au fond qu'il n'y a plus de place pour elle. Et même si elle sait qu'elle aime toujours son mari et qu'il aura besoin d'elle au moment opportun.

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Ce fut d'ailleurs suite à ce film que des consciences s'éveillèrent et que la loi britannique changea.

Le film annonce & les posters témoignent de la difficulté à "vendre" le sujet. Pas un mot de l'objet du chantage, juste d'un secret tellement affreux que le public doit le voir pour le croire. Ce fut le film qu'il fallut croire pour le voir, tant les réactions furent vives (d'un cote des détracteurs comme des défenseurs)à sa sortie.

Ce fut en tout cas un accélérateur de carrière pour Bogarde, qui vit là sa popularité toujours intacte et se vit offrir des roles plus difficiles (The Servant, par exemple, qui suivi peu de temps après).

On regarde bien évidemment le film avec un autre oeil aujourd'hui. D'une part, même si certaines mentalités sont restées bloquées, le traitement du sujet a évolué (le chantage n'a plus vraiment cours aujourdh'ui à ce sujet). Et aussi, le fait que Dirk Bogarde fut lui-même homosexuel (non déclaré à l'époque) ne fait qu'ajouter à l'importance du film.

Film qui tranchait d'ailleurs avec la palanquée de films US traitant plus ou moins du sujet homosexuel de manière beaucoup plus caricaturale, négative et pas du tout progressiste.


Vu sur le DVD Z2 Britannqiue de chez HVe.

1.66:1
16/9
1H40
Noir et blanc
anglAis 1.0
Film annonce
interview Dirk Bogarde.
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Superwonderscope
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Re: Victim - Basil Dearden (1961)

Message par Superwonderscope »

Revu sur le très beau Blu ray britannique de chez Network, agrémenté de bonus comme une conversation avec Dick Bogarde sur l'ensemble de sa carrière, le film annonce, galerie de photos, matériel promotionnel du film et photos de tournages. l'ensemble du matériel est accessible en pdf.


1080p 1.66:1 noir et blanc version anglaise LPCM 1.0 avec sta. codé région B, sur un BD 25, durée de 101mn.

Je n'ai pas grand chose à ajouter à ce que j'i écrit il y a 11 ans. L'interprétation de Bogarde et de Price sont en effet empruntes de gravité, d'autant plus justement qu'ils "étaient homosexuels tous les deux et sous le coup de la loi britannique. (même si relativement" protégés" dans le business où ils se trouvaient). Il s'agit d'un film quand même assez essentiel en Grande Bretagne d'abord, car ayant presque failli ne pas passer le couperet de la censure britannique. Il me semble qu'il a du exister une ou deux coupes pour passer le X de la BBFC, mais je ne sais plus lesquelles.
Essentiel car il ouvrit la voie à des sujets plus graves et traités de manière plus frontales. Une essence/ancrage social-e qui était déjà bien ancré-e dans certains films, mais qui allaient devenir une marque de fabrique du cinéma britannique. Souvent vent debout contre certaines lois victorienne iniques. La caméra n'hésite pas à plonger également dans une atmosphère londonienne excessivement vivante, populaire, pas dupe de ce qui se passe. Cela rejoint quelque peu Sapphire, réalisé deux ans auparavant (avec également les deux personnages de flics comme un des moteurs de l'histoire). C'est la photo noir et blanc du blanc qui ajoute l'oppression nécessaire sur ce monde des ombres de l'époque. très bien vu.

Sur la forme, si l'on ôte certains stigmates mélos visant maladroitement à appuyer les effets de drame intérieur, Dearden fait preuve d'une certaine inventivité. La scène de début, très prise sur le vif, tournée en extérieur, possède une force assez inattendue pour l'ouverture du film. Bogarde fait beaucoup passer dans sa retenue et sa carcasse qui se fissure graduellement.

Deux niveaux d'écriture : celui d'une étude de moeurs et de personnages, et la forme d'un thriller. D'un côté comme de l'autre, le film n'offre pas de réponses faciles et sa fin même reste en retrait, quelque peu, de la force de son audace quant au sujet. Peut être aussi était-ce que le Royaume Uni (à l'époque) pouvait supporter de pire en qualité de limites de représentation?


A noter qu'il arrive le blu ray français chez Elephant dans quelques semaines.
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