le réalisateur aura mis 7 ans pour faire ce film, rejeté par tous les grands studios. Sur le papier, cela a tout pour faire peur : qui aurait voulu d'un film de 3h35 tourné en VistaVision sur un architecte hongrois qui touche au rêve américain pour s'y briser?
C'est déroutant - et la durée n'y est pour rien. Un montage équilibré rend le récit fluide, riche. On suit cette odyssée américaine de manière fascinante. Le scénario reste d'une richesse thématique trop rare en ces temps courant. La notion de brutalisme ne s'applique pas ici seulement à l'architecture, mais aux sujet du rêve capitaliste et d'antisémitisme. Mais également aux soucis d'expérience d'assimilation immigrée. Qui se heurte à une certaine naïveté américaine sur l'expertise européenne et les centaines d'années de douleur et de tragédie infusée dans l'art et l'architecture.
Sur un budget ridicule pour le sujet (10 millions de $), le film réussit à se faire poser la question si l'on assiste à un biopic ou non. Toth n'a jamais existé mais Corbet s'est clairement inspiré de l'expérience de deux architectes hongrois pour les constructions. Les effets visuels sont discrets, principalement sur la construction du projet commandité par Van Buren. la mise en scène s'inspire directement de ces lignes brutes, des couleurs grises/bleues décrites par le projet même. Saisissant .
Il y a un souffle inespéré qui se créé, aussi due à la splendide photographie qui donne quelque chose d'organique à la projection. les thèmes brassés (bureaucrate obscure, addictions, sexualités contrariées...) s'y orchestres avec calme avant la tempête. Le récit se déroule avec une certaine amplitude, une vraie clarté qui fait sous-entendre quelque chose de sombre sur l'ensemble. Cela décrit aussi la brutalité (pas le brutalisme) des rapports humains, avec dialogues délivrés avec justesse (lorsque le fils Van Buren dit a Toth "vous êtes tolérés, ici"). Ce qui culmine avec le
Spoiler : :
Il y a une intermission de 15mn, avec le décompte qui s'affiche à l'écran, et avec des morceaux de piano qui s'égrènent. C'est assez intéllgiement découpé deux trois segments, dont le troisième enfonce le clou des thèmes abordés.
Brody y est impérial.
Il y a une vraie cohérence entre sujet et mise en images, c'est très rare aujourd'hui.
je suis ressorti de la projection en ne sachant pas vraiment quoi en penser, si ce c'est d'avoir été dérouté. mais jamais ennuyé.
Ce matin, c'est sûr, c'est un grand film.
très recommandé.